« Célestine » – Sophie Wouters

Lu en : Avril 2024

Je replonge, avec ce retour, quelques semaines en arrière, alors que je préparais les tables rondes pour le salon Iris Noir, c’est dans la poche. Sophie Wouters est une compatriote, une artiste, mais aussi une femme d’une générosité incroyable !

Lorsque j’ai entamé dans Célestine, j’avoue que je ne savais pas très bien où je mettais les pieds. Je savais juste que l’auteure allait me présenter Célestine, une jeune fille douce, mais surtout très jolie, et que celle-ci se retrouverait un jour sur le banc des accusés. Comment, pourquoi ? C’est l’objet de ce livre, assez court, que j’ai entamé, je l’avoue, un peu sans conviction. En effet, l’histoire (qui se déroule dans les années ’60) s’ouvre sur un récit, assez rural dans les expressions, de la naissance particulière de Célestine, alors que ses parents viennent juste de mourir… De quoi donner le ton d’emblée, car « on m’a rapporté qu’elle ne pleura pas un seul instant. (…) Mais moi, j’vous l’dis, déjà une sans-cœur, la p’tite ! »

À partir de là, Célestine est confiée aux bons soins de Berthe et Aristide, des parents un peu éloignés qui n’avaient pourtant jamais voulu d’enfants. Je vous arrête tout de suite ! Effectivement, Berthe est un tantinet bourrue, fondamentalement catho et passablement vieux jeu. Mais Berthe aime la petite d’un amour aussi inconditionnel que si elle avait été sa vraie mère. Et le lecteur voit la petite Célestine grandir, devenir une magnifique jeune fille avec des rêves simples et un cœur énorme. Pendant que Célestine grandit, l’auteure balise son récit avec des faits historiques marquants, découverts par la petite famille au travers de son téléviseur, objet fascinant pour une époque qui découvrait le monde au travers de cette petite lucarne. Dans cette famille, le dialogue n’a pas vraiment sa place. Pas par méchanceté, juste qu’il passe toujours au second plan face aux priorités de la vie : se laver, éplucher les légumes, faire ses devoirs, louer Dieu… Dieu qui semble être une réponse à tout. Et la si jolie Célestine, qui rayonne dans les rues de son village, s’attire autant la sympathie que la jalousie. Et apprend à ses dépens que la beauté n’est pas toujours un don de Dieu. Surtout pas de Dieu, vu comment certains de ses représentants s’imaginent devoir inculquer la foi ! Pour autant, Célestine tente de garder le cap, mène sa barque et rêve de petits écrans. Jusqu’au drame.

La rudesse des lieux et des personnages, teinte sous une plume que l’auteure a voulue représentative de l’époque et du milieu. Un peu rustre, un peu simple, et ce qui m’était apparu au départ comme un inconvénient est rapidement devenu la force de ce livre. Parce que l’auteur nous plonge dans le bain d’une époque dans laquelle certaines choses ne se font pas, ne se disent pas…

Célestine et Berthe nous arrachent le cœur. Sophie Wouters nous livre un destin tragique, guidé par la malveillance de quelques-uns. Ces quelques-uns, dans notre monde, qui sont malheureusement toujours tellement présents, cachés au détour de la plus étincelante des situations. Je digresse, bien sûr, mais Célestine, c’est un destin brisé en plein vol comme il en existe trop. Et si chaque aile blessée ne conduit pas forcément à la case procès, ces ailes abîmées sont pourtant un fardeau que nous sommes nombreuses à devoir porter. Une « faiblesse » à surmonter, à camoufler, à dépasser. Pour quelques instants extorqués, ce sont des vies entières pour oublier…

Merci à Sophie Wouters pour ce texte vibrant de simplicité et de sincérité…

21 réflexions sur “« Célestine » – Sophie Wouters

  1. Ouah, quelle chronique Nath, on te sent touchée par ce livre. On sent l’émotion dans tes mots, on sent la dureté du récit, de cette vie brisé, de ces moments bafoués. Je ne connais pas Célestine, mais apparemment elle ne laisse pas de marbre cette jeune femme. Merci pour cette découverte et pour ta belle chronique !

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