« La cité sous les cendres » – Don Winslow

Lu en : Juillet 2024

Et voilà le retour de notre ami Dany Ryan ! L’ancien docker-malfrat de Rhode Island n’est plus. Après avoir survécu à une guerre d’honneur bafoué qui a coûté cher en vies humaines dans « La cité en flammes« , après avoir succombé aux sirènes de L.A. dans « La cité des rêves » et réussi à se racheter une conduite (entendez : manigancé avec les autorités pour faire à leur place un sale boulot en échange d’une réhabilitation), Dany est maintenant un respectable et respecté homme d’affaires à Vegas ! Rien que ça !

Première petite mise au point : s’attaquer à la conclusion d’une trilogie me semble vraiment impossible sans avoir préalablement lu les deux premiers opus.

Revenons-en à l’incroyable Dany ! Il peut paraître étonnant de le retrouver à la tête d’une colossale entreprise largement influente dans la sphère de Vegas, eu égard à toutes les précautions prises par la Commission des Jeux pour arriver à retirer des griffes de la mafia la domination des casinos. Pas de problèmes pour Dany. Officiellement, il n’est rien d’autre que « directeur des opérations ». Mais c’est lui qui fait tourner la machine, à force de travail, de bonnes idées et d’investissements judicieux. Exit les trafics et autres débordements !

Dans la sphère de Vegas, il n’est pas le seul entrepreneur florissant, mais son plus gros rival et lui se respectent et se partagent gentiment le marché.

Jusqu’au jour où un vieil hôtel est mis en vente. Il semble que son propriétaire veuille le vendre à la concurrence. Mais Dany a de grands projets pour cet hôtel, et il ne le laissera pas filer aussi rapidement. Et bien qu’il refuse d’à nouveau recourir aux antiques méthodes d’intimidations, il utilise malgré tout son aura d’ex-mafieux pour mener la transaction. Sans menace, sans extorsion, certes, à la loyale, même, pense-t-il.

Bien sûr, ce revirement de situation constitue un affront pour l’adversaire lésé par cette vente. Mais au-delà de cette transaction foirée, les rumeurs (fausses, comme le sont souvent les rumeurs !) viennent titiller l’ego du perdant. L’ego, encore et toujours ! Et la rumeur continue d’enfler. À tel point que Dany se sent menacé. L’occasion de rameuter son ancien gang, « au cas où ».

Inutile d’en dire plus, mais, on s’en doute, l’escalade est inévitable.

Dans cet opus, l’auteur nous peint un tableau historique de Las Vegas où le revers est nettement moins brillant que la partie visible faite de bling-bling et de machines à sous.

Une fois de plus, il oppose des durs de durs, des malfrats nés malfrats, mais au cœur pur, à d’illustres sommités de la société, policiers, avocats, juges, hommes d’affaires, mais qui ont le cœur bien plus noir et qui se complaisent dans la corruption, mettant entre parenthèses toute éthique lorsque le gain est suffisant. Une fois de plus, l’auteur se pose en observateur d’une société corrompue et gangrénée. Et finalement, Dany et sa bande, avec tous leurs squelettes dans le placard, au propre comme au figuré, recueillent les suffrages des lecteurs. Car ils sont ce qu’ils sont et ne cachent pas leur personnalité sous de beaux costumes trompeurs. L’auteur nous pousse à différencier les crimes commis au nom de l’honneur ou de la famille et les crimes perpétrés pour l’argent et le pouvoir.

On note également que ce dernier opus est d’une grande sensibilité, comme si, par ces mots et l’histoire de Dany, l’auteur adressait à ses lecteurs un ultime adieu, lui qui a annoncé quitter la scène littéraire.

J’en retiens un opus plus en finesse qui clôt magnifiquement une saga mafieuse digne des plus grandes histoires hollywoodiennes !

17 réflexions sur “« La cité sous les cendres » – Don Winslow

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