« Cache-cache » – Søren Sveistrup

Lu en : Décembre 2025

Je garde un excellent souvenir d’Octobre, même si je l’ai lu il y a déjà un bon moment. Alors, lorsque j’ai découvert que Søren Sveistrup sortait un nouveau roman, Cache-cache, je n’ai pas hésité longtemps : j’avais très envie de replonger dans son univers. Un univers nordique, certes, mais étonnamment plus rythmé que ce à quoi je suis habituée dans le polar scandinave, un genre avec lequel j’ai souvent un peu de mal. Octobre, en revanche, m’avait laissé l’impression d’un récit bien plus dynamique.

Je me souvenais surtout de ce duo d’enquêteurs atypique : Naia Thulin, jeune mère très impliquée dans la vie de son enfant, déterminée à ne pas reproduire les erreurs de son propre père, flic trop absorbé par son travail. Et en face, cet enquêteur d’Europol venu tout droit de La Haye: Mark Hess. Taciturne, fermé, semblant se moquer de tout, mais redoutablement efficace ! Un véritable limier hors pair, mais relativement peu enclin à la communication.

Pour cette lecture, j’ai embarqué mon amie Dominique avec moi, qui gardait les mêmes réminiscences que moi de la lecture d’Octobre. Nous avions cependant oublié un détail : les deux enquêteurs avaient aussi une histoire personnelle commune. Première surprise donc, en les retrouvant dans une situation très complexe, chargée de non-dits. Mais, à notre décharge, nous sommes d’indécrottables anti romance, si bien que ce détail nous était totalement sorti de la tête.

Cache-cache s’ouvre sur une sortie scolaire dans les années 1990, qui vire rapidement au drame avec la découverte du cadavre d’un enfant. Retour de nos jours, où Naia Thulin, désormais affectée au NC3 (une unité spécialisée en cybercrimes), est appelée à se pencher sur une disparition inquiétante : celle d’une jeune mère qui, depuis plusieurs semaines, était traquée. Elle recevait des messages anonymes incessants, malgré les nombreux changements de numéro de téléphone, d’abord cette comptine comme celles utilisées dans les jeux de cache-cache infantiles, puis ces photos d’elle-même et cette légende glaçante : « Trouvée ». Impossible d’en comprendre la finalité.

Si, dans un premier temps, seule Naia mesure la gravité de la situation, la découverte d’un cadavre démembré vient brutalement balayer les doutes des forces de l’ordre. Naia est alors contrainte de rejoindre l’équipe d’enquête, malgré ses réticences, pour comprendre qui s’en est pris à la jeune femme… et surtout empêcher que le tueur ne frappe à nouveau. Car il apparaît vite qu’il n’y aura pas qu’une seule victime de cette comptine macabre.

En parallèle, nous faisons la connaissance de Marie Holst, une mère brisée par la mort de sa fille, Caroline. Perdre un enfant est déjà un drame absolu, mais ne pas savoir qui lui a ôté la vie est un cauchemar supplémentaire. Là où son ex-mari tente tant bien que mal de se reconstruire, Marie reste prisonnière de ses questions, au risque de perdre aussi ses autres enfants. Et en creusant, on découvre que Caroline aussi avait reçu d’étranges messages avant de finir en pièces détachées…

Naia y voit rapidement un lien, mais sa hiérarchie refuse de la suivre dans cette direction. Pour son enquête, on lui recolle Hess dans les pattes. Travailler à nouveau avec celui qui fut un temps son compagnon reste compliqué : il ne parle toujours pas, déduit en silence, refuse de livrer son raisonnement. Et il est d’autant plus insaisissable qu’il doit aussi veiller sur son frère, hospitalisé dans un état grave. Malgré tout, le duo fonctionne toujours aussi bien, porté par cette tension sourde et ces non-dits laissés en suspens depuis leur dernière enquête. On retrouve également avec plaisir Lee, la fille de Naia, et Aksel, l’ancien coéquipier de son père de qui elle est très proche.

Si nos talents de détectives amateurs, à Dominique et à moi, ont quelque peu émoussé l’effet de surprise (nous avons déduit l’identité de l’assassin assez tôt) il faut reconnaître que l’intérêt du roman réside bien plus dans le “pourquoi” que dans le “qui”. Søren Sveistrup s’attache avant tout à disséquer les traumatismes de l’enfance, leurs répercussions à long terme, et les engrenages invisibles qui mènent à l’horreur.

Malgré la taille du pavé (un bon 700 pages), Cache-cache se dévore rapidement. La famille est au cœur du récit, et le message est clair : ce qui est caché finit toujours par ressurgir, souvent de la pire des manières. Le jeu de cache-cache devient ici une métaphore glaçante. Recevoir des messages anonymes de plus en plus oppressants, se savoir observé, traqué, est un véritable enfer. Les victimes sombrent peu à peu dans la paranoïa, et l’auteur parvient à nous faire ressentir cette angoisse avec une redoutable efficacité. Cache-cache installe une tension constante, presque sourde, où chaque détail compte et où l’on avance clairement la boule au ventre.

Si le final ne nous a pas réellement surprises, il reste néanmoins à la hauteur, apportant (presque) toutes les réponses attendues. Une chose est sûre : j’espère sincèrement que Søren Sveistrup ne nous fera plus attendre aussi longtemps avant de nous permettre de retrouver Naia Thulin et Mark Hess !

30 réflexions sur “« Cache-cache » – Søren Sveistrup

  1. Avatar de Céline C. Céline C.

    Oh trop chouette ta chronique ! ça donne envie. J’ai quelques polars scandinaves sur ma WL, qui trainent là pour une raison que j’ignore, car comme pour les thrillers psychologiques, je déteste ça (je tairais ici le nom du dernier que j’ai abandonné afin de ne pas me faire lapider … 😂). Du coup il faut lire Octobre au préalable si j’ai bien tout suivi …

    Merci Nath 😘

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